Les choses simples

15.6.07

Marcher droit, mettre un pas devant l'autre, la tête haute

Jeudi soir.

Je suis parti assez vite du boulot car j’avais rendez-vous avec A. de l’Assofac aux Arcades. A cause de la mission d’intérim, nous n’avons pas pu nous voir ces derniers temps et je ne savais plus où nous en étions dans notre « plan de guerre » pour retrouver du boulot. Du coup, elle a accepté de me recevoir hors des heures autorisées.
Je suis arrivé là-bas un peu avant 18h et nous sommes allés dans son bureau, deux ou trois de ses collègues étaient encore là.
Je lui ai expliqué ce que je faisais en ce moment, pourquoi j’avais accepté la mission et pourquoi j’étais sur le point d’accepter le CDD malgré le salaire misérable. Elle était plutôt d’accord avec moi, ça ne pouvait que me faire du bien de travailler et ça ne m’empêchait pas de continuer à chercher du travail dans mon secteur en parallèle. Par contre, elle m’a déconseillé de rajouter cette expérience sur mon CV pour le moment. Elle trouve qu’opérateur de saisie ne jouera pas forcément en ma faveur. On en reparlera en septembre.

Et puis, après m’avoir donné des indications pour optimiser mon « plan de guerre », elle m’a annoncé une nouvelle :

A : Je dois vous dire que je quitte l’ASSOFAC.
Moi : ….
A : J’ai trouvé un poste à l’étranger.
Moi : ….
A : C’était un projet que j’avais depuis longtemps.
Moi (encore un peu étourdi) : Ah…
A : Je suis encore là jusqu’au 29 juin.
Moi : Ah. (Je me reprends) Mais c’est horrible.
A (elle se marre) : Non, quand même pas, vous avez toujours tendance à exagérer.
Moi : Enfin, je veux dire, vous… C’est… Ah bon ?
A : Oui, mais je vous laisse entre les mains d’une collègue très compétente, qui pense comme moi, à qui je vais très bien expliquer votre dossier et ce que nous avons mis en place.
Moi : D’accord mais…
A (elle me coupe en souriant) : Oui, je sais, elle ne sera pas comme moi, efficace, professionnelle et charmante…
Moi : En effet. (Je regarde dans le vide) C’est horrible. Enfin, non, vous ne pouvez pas attendre que tous vos candidats aient trouvé un boulot pour penser à votre vie, je comprends mais là, comme ça, en cours…
A : Je ne me sens pas très à l’aise, vous savez. C’est une situation inconfortable. Mais je ne suis marié ni à mon entreprise et du coup, ni a mes candidats. Mais vous verrez, ma collègue est génial.
Moi : Je ne doute pas une seconde mais… C’est horrible… (Je me dis soudain que j’en fais un peu trop et que même si ça me touche vraiment, qui je suis pour jouer le jeu de la culpabilité ?) Et vous allez où ?
A : En Irlande.
Moi : Ah, c’est bien, c’est vert, il y a des moutons, de la pluie et de la bière… (Je ne pouvais pas dire quelque chose de moins creux).
A : Il y a plus de moutons que d’habitants mais il ne pleut pas tout le temps. J’ai fait deux semaines de randonnées en Irlande et il n’y a pas eu une goutte de pluie. C’est d’ailleurs pendant cette randonnée que j’ai trouvé le poste.
Moi : Ok. Donc, pour trouver du boulot, vous me conseillez aussi la randonnée ?
A (elle se marre) : Oui, entre autres.

C’est en quittant son bureau et après lui avoir serré la main que je me suis dit que c’était peut-être la dernière fois que je la voyais. Il s’était crée quelque chose entre nous et je ne savais pas trop quoi. J’ai eu le temps d’y réfléchir.

En fait, cette fille m’a fait penser à mon kiné, celui qui m’a aidé à remarcher, recourir, celui que je considère (alors qu’il n’a fait que son boulot) comme mon sauveur. Ce n’est pas rien d’aller voir quelqu’un quasiment tous les jours pendant six mois, d’arriver en béquille, la jambe flasque et le genou gonflé et de sortir de là, plusieurs mois plus tard la tête haute, les jambes musclées, pouvant mettre un pied devant l’autre comme s’il ne s’était rien passé.

Eh bien là, A. c’est un peu la même chose. Elle m’a aidé à relever la tête et à être fier de moi, de mon expérience, de ce que je valais. En arrivant dans son bureau la première fois, je me disais que je n’étais qu’un pauvre gars qui errait de boulot en boulot et qui ne savait pas quoi faire de lui-même. Elle m’a redonné confiance, a fait ressortir de mes expériences même celle dont j’étais le moins fier, des compétences intéressantes, pertinentes et m’a donné envie de me battre pour qu’on les reconnaisse.
Ca non plus, ce n’est pas rien. Tomber sur quelqu’un qui vous confirme que, sur le plan professionnel, vous valez quelque chose. Elle était à mon écoute et a pris mon cas comme un cas normal alors qu’il me semblait désespéré. Bref, elle a fait son boulot et une autre aurait pu le faire aussi bien mais malgré tout, une complicité s’était créée et pour ma part une certaine reconnaissance. Et voir ce lien se briser à la moitié du chemin alors que je n’ai toujours pas retrouver un boulot stable dans ma branche m’a un peu coupé les ailes.

J’ai rejoins Sandrine et ses parents dans les Arcades. J’étais encore un peu absent. J’ai essayé d’expliquer cela à Sandrine mais tout était encore trop frais et je ne trouvais pas les bons mots.

Nous avons accompagné mes beaux-parents à Darty. Ils voulaient prendre la Darty Box mais juste pour avoir le téléphone sans France Télécom et gratuit vers le Portugal et puis les chaînes de télé. Ils sont tombés sur une vendeuse qui devait en avoir marre de sa journée. Elle les a d’abord trimballé dans le magasin ne sachant pas où s’installer et finalement quand elle a réussi à trouver un ordinateur et qu’ils ont pu s’installer devant elle, elle leur a expliqué deux trois trucs. Il y a avait le prix de base mais ils devaient rajouter 5 € par mois pour le dégroupage total, et encore 5 € pour le pack sécurité pour éviter les pop-up (les beaux-parents n’ont rien dit même s’ils ne savent pas du tout ce que c’est et même si Sandrine venait de dire à la vendeuse qu’ils n’avaient pas d’ordinateur et qu’ils s’en foutaient d’Internet). Comme le prix changeait de minute en minute, ils ont préféré partir en disant à la jeune fille qu’ils avaient besoin de réfléchir encore un peu. S’il y a un bien un truc qu’ils n’aiment pas c’est que le prix affiché ne corresponde pas au prix à payer. Après leur départ, nous avions encore un peu de temps avant le début du film mais j’ai préféré acheter nos places tout de suite. Nous avons mangé chez Viagio, le truc en face du McDo qui propose des pâtes dans des cartons. Ce n’est pas trop mauvais.
Nous avons vu Shrek le troisième et c’était très dôle, même en VO.

Nous avons failli attraper le 303. J’ai fait signe au chauffeur, j’ai même joint mes mains et tenté un regard de chat potté mais il est passé devant nous sans même nous jeter un regard. Nous avons pris le RER et attendu le 203.

De retour à la maison, nous n’avons pas pu résister à l’appel d’un nouvel épisode de 24.
Jack Bauer, à terre, cassé en 12000 morceaux, fatigué, épuisé, arrive encore à se relever pour prendre un appel sur le portable de son collègue. Il a sauvé le monde pour la millième fois et on le fait encore chier avec des histoires… Quand ce ne sont pas les russes, les pseudo-irakiens, ce sont les chinois qui reviennent à l’attaque… Ah, ils sont forts quand même !!!

Aujourd’hui, F. le CDD qui bosse dans le bureau près du mien est revenu s’installer sur une chaise pour discuter avec moi : politique, expension de l’univers, littérature fantastique et Poker.
Il m’a dit qu’il ne jouait plus au Poker parce qu’il ne pouvait pas s’empêcher de faire des tours avec les cartes et que les gens le traitaient de tricheur. En me disant cela, il jouait avec trois grosses pièces de monnaie, deux en argent, une bronze et les faisait disparaître, apparaître, sauter l’une sur l’autre, etc. Je jetais des coups d’œil admiratif mais me refusait de lui en parler car je savais qu’il n’attendait que cela et je ne tenais pas à ce qu’il reste trop longtemps. Malgré tout, il est resté 25 minutes alors que de nombreux blancs auraient pu lui mettre la puce à l’oreille sur mon état de concentration et mon envie de discuter avec lui.