Les choses simples

13.6.07

Fabriqué avec un coeur différent

Mardi soir.
Après avoir fini mon livre dans la tristesse, je me suis détendu dans le canapé en poursuivant ma quête de savoir au sujet de Grey’s Anatomy. Vers 18h45, j’ai déposé mes livres à la bibliothèque et flâné un petit peu entre les rayons pour trouver mon bonheur. Je n’avais pas d’idée précise à part le dernier roman de Jonathan Safran Foer, le mari de Nicole Krauss.
En prenant ma carte la bibliothécaire, un peu âgée, que je n'ai dû voir qu'une ou deux fois, m’a parlé (alors que d’habitude, avec les autres, tout se fait en chuchotant, avec de petits sourires, des gestes lents) :

ELLE : Vous avez une sacrée cadence de lecture ?
MOI : Oui (j’adore discuter avec des inconnues…).
ELLE : Vous les avez tous lus ?
MOI : Oui (je souris poliment et puis, sans trop savoir pourquoi je poursuis). Et je vous conseille fortement le livre de Nicole Krauss, L’histoire de l’amour. Je viens de le finir il y a 20 minutes et je ne m’en suis toujours pas remis.
ELLE : Ah bon ! (Elle jette un coup d’œil derrière elle où attend sur un chariot le livre en question et sa couverture rose puis repose les yeux sur moi). Vous venez souvent ?
MOI : Oui. Je ne peux plus acheter de livres, je manque de place alors je viens chez vous.
ELLE : Et vous trouvez ce que vous voulez ?
MOI : Oui (j’hésite à lui dire que sa bibliothèque est quand même moyenne, mal située, mal éclairée et que celle de Noisy-le-Grand est tellement plus intéressante), pratiquement à chaque fois.

En passant la porte, je me suis demandé pourquoi j’avais soutenu cette courte conversation et pourquoi j’avais eu besoin de donner mon avis au sujet du livre de Nicole Krauss. Je devais encore être sous le choc et puis, de temps en temps, discuter quelques secondes avec quelqu’un ne peut pas faire de mal.

J’ai marché tranquillement jusqu’au bâtiment, je suis monté dans un ascenseur minuscule et j’ai appuyé sur le bouton 7. Une dame, avec un poignet bandé est arrivée et s’est insérée dans l’habitacle. Elle avait l’air de souffrir. Elle est descendue au 2ème et moi, je suis sorti au 7ème étage pour lire sur la porte du cardiologue un « sonnez et entrez » bien connu. Belle salle d’attente, du jazz, des Paris-Match récents à consulter et des photos amateurs en noir et blanc plutôt réussies accrochées aux murs. Je n’attends pas longtemps mais quand le grand cardiologue, Monsieur B., laisse apparaître ses cheveux blancs et sa moustache ébouriffée, quelqu’un sonne, entre et appelle le docteur. Ce dernier va voir quelques secondes le pourquoi de cette intrusion. Il revient et me dit qu’il va débrancher une machine, qu’il en a pour deux secondes… Dans un cabinet de cardiologue, entendre « je vais débrancher une machine » n’est pas vraiment bon signe…
A peine deux minutes plus tard, j’étais derrière son bureau lui expliquant la raison de ma venue : un simple contrôle. C’est la deuxième fois que je le vois. Je le préfère mille fois à celui que j’avais à Noisy, un chilien, qui me recevait dans une sorte de cagibi et qui malgré les 2000 diplômes accrochés aux murs ne semblait pas trop savoir ce qu’il faisait. Et puis il m’avait prescrit des médicaments à prendre toute ma vie alors que le Docteur B. n’en voit pas l’intérêt parce que ce que j’ai est complètement bénin, « vous avez été fabriqué comme ça c’est tout ».

J’ai été fabriqué avec un cœur différent, ça peut expliquer certaines choses…

En tout cas, il m’a confirmé que tout allait bien.
Au revoir et merci, 95 € pour une photo du cœur… !

Je suis allé rejoindre Sandrine aux Arcades. Nous avons traîné un peu et comme mon anniversaire approche, j’ai pu me faire offrir des fringues chez Jules. Je me suis également acheté une tondeuse, la mienne a rendu l’âme à mon retour du Portugal et il fallait vraiment que je fasse quelque chose, ça dépassait de partout…
Le soir, pendant que Sandrine regardait les épisodes de Grey qui pour moi ne veulent rien dire puisque je n’en suis qu’au début, j’ai cherché du boulot, répondu à des mails, regarder deux trois trucs sur Internet, etc.
Et bien sûr, nous avons fini la soirée avec un épisode de 24.
Si j’étais un méchant et que j’étais poursuivi par Jack Bauer, je crois que moi aussi je me couperais le bras pour sauver mes fesses et éviter qu’il me torture…