Les choses simples

9.2.10

Alors, qu'est-ce que tu deviens ?

Jeudi soir

Retour à Saint-Maur, chez notre courtier de la mafia portugaise, à qui nous avons donné toute liberté pour nous trouver le meilleur taux possible.

Nous avions prévu de venir pour signer mais aussi pour avoir notre lettre d’accord, avec laquelle nous pensions retourner dans notre banque pour faire pression afin qu’ils s’alignent. Nous savions que notre conseillère ne pourrait pas faire mieux que ce que le courtier nous avait trouvé mais nous voulions tenter le coup.

Nous avons rejoint le père de Sandrine à 19h30, après avoir pris un RER et un bus, et acheté une baguette de pain pour patienter.

Dans le bureau du mec, nous avons regardé la feuille, écouter le courtier nous refaire le montage du prêt avec le taux pour nous donner une idée du coût total du crédit. Il attendait notre signature. Nous savions que celle-ci nous pousserait à faire le chèque pour ses frais. Du coup, nous hésitions, trouvions des excuses bidon. Je regardais Sandrine pour lui faire comprendre que ce petit jeu ne servait à rien, que nous ne réussirons jamais à trouver mieux ailleurs et qu’il fallait se lancer, mais notre conversation télépathique n’a pas bien fonctionné. Résultat des courses : il a gardé sa feuille, nous avons gardé notre chèque et nous sommes rentrés. Aucun intérêt et du temps perdu pour tout le monde.

Vendredi

Le midi, je suis allé à la bibliothèque André Malraux pour travailler un peu. Du silence, des livres, mon ordinateur, c'était parfait. Je crois que je vais y retourner.
Louisa, Hédi et leurs deux enfants, Mehdi et Yasmine, sont venus manger à la maison. Louisa est une ancienne collègue de Sandrine avec qui elle s’entendait vraiment bien à l’époque. Tellement bien que nous sommes allés à son mariage et que Sandrine a réussi à lui vanter Neuilly-sur-Marne au point qu’habitant Levallois-Perret depuis des années, elle avait opté avec son futur mari pour un appartement à deux cents mètre de chez nous. Malgré tout, c’était la première fois qu’ils venaient chez nous pour dîner. C’est vrai qu’entretemps, il y a eu un éloignement, des embrouilles de collègues interposées, une non-invitation à notre mariage mais quand même…

Le plus drôle, c’est qu’ils viennent de vendre et qu’ils déménagent dans une semaine à Dammartin-en-Goële. Ils ont d’ailleurs vendu à Monsieur M., celui qui nous avait fait la première offre sur notre appartement et que nous avions refusé, et en passant par la même agence que nous… Le monde est petit.

Du coup, cette soirée ressemblait à un dîner de mises à jour de toutes les informations depuis deux ans avant de finir par plus se voir du tout. Avant, on pouvait les rencontrer dans le bus mais là, ça risque de devenir plus compliqué.

Nous avons tout de même passé une bonne soirée et Vincent a pu jouer avec Mehdi, de quelques mois plus vieux.

Samedi

Stéphane est passé me prendre à 8h30 et nous sommes allés chez Micaël. La bétonnière était déjà en marche à l’étage, avec le père, le frère et l’oncle de Laetitia, et Micaël bien sûr. Stéphane s’est installé au poste de la poulie et moi aux seaux. Il devait rester deux mètres cube. Nous avons fini juste avant la pause déjeuner et le repas que Laetitia avait préparé pour nous tous. J’ai de temps en temps remplacé Stéphane pour moi aussi monter quelques seaux et jeter le sable sur le tas qui baissait doucement ou directement dans la bétonnière en marche, mais je crois avoir entendu le père de Laetitia dire à Stéphane qu’il était plus rapide et plus efficace, ou un truc dans le genre, alors, je ne me suis pas fait prier et j’ai gardé mon poste en bas avec ma pelle, mes seaux et mon sable, comme un petit garçon qui s’amuse sur la plage. Avant d’aller manger, j’ai même poussé le vice jusqu’à nettoyer et balayer pour laisser l’endroit encore plus propre qu’à mon arrivée. Je sais que ça ne sert à rien que tout va être Sali quelques temps après mais je préfère.

Stéphane m’a ramené pour 15h.

Mon père est passé vers 16h30 et jusqu’à 18h. Nous en avons profité pour lui montrer les photos de la maison.

Nous avons mis un temps fou pour atteindre l’agence du courtier. Aller à Saint-Maur un samedi soir en passant par le carrefour de Nogent au-dessus de l’A4 puis la fourchette de Champigny, ce n’est pas une bonne idée.

Nous avons signé et fait notre chèque puis nous sommes rentrés, du temps que nous aurions pu ne pas perdre dès jeudi soir mais bon…

Le soir, nous avons regardé les deux premiers épisodes de la dernière saison de Lost. Nous n’avons rien compris mais c’était génial.

Dimanche

J’ai entendu Vincent faire du bruit de très bonne heure mais je n’ai pas eu le courage. Quand j’ai ouvert mes yeux, il devait être 8h45 et il jouait et parlait encore dans son lit. J’ai eu pitié de lui, il avait dû trouver le temps long.

En jouant avec sa mère, il a plus ou moins fini par lui donner une claque. Sandrine s’est fâchée, et je n’aurais pas aimé être à la place de Vincent.

Stéphane est passé me chercher pour aller au badminton. Nous avons fait un simple puis plusieurs sets en double contre le président du club et un mec qui ressemble au Docteur Romano dans Urgences.

Vincent n’a, semble-t-il, pas dormi pendant sa sieste. On l’entendait parler, jouer, etc. Après plusieurs passages dans sa chambre pour lui rappeler qu’il fallait dormir, que c’était mieux pour lui, etc, nous avons abandonné.

Nous sommes allés à Noisy-le-Grand, à quelques mètres de notre future maison ou de la maison des parents de Laetitia, chez Elodie et Eric. Nous avons pu voir que les enfants, Titouan et Gwenaëlle avaient bien grandi. Elodie avait préparé des petits puzzles dans le salon pour Vincent, le temps que les enfants se réveillent de leur sieste. Titouan a initié Vincent au déguisement de chevalier, puis au masque de Batman. Titouan voulait se battre en combat singulier contre Vincent, lui avec une hache et Vincent avec une épée, mais mon fils ne réagissait pas trop et voulait surtout essayer tous les jouets. Du coup, Titouan m’a défié et moi je n’ai pas pu résister. Vincent a eu l’air de beaucoup s’amuser. J’ai même réussi à le laisser dans la salle de jeu avec Titouan, tout en étant dans le salon. J’avais quand même l’oreille tendue pour analyser tous les bruits.

Nous ne nous étions pas vus depuis quelques temps et ils nous ont posé pas mal de question. Eric m’a demandé, comme ça, à l’improviste : « Et tu écris toujours ? » Je leur avais fait lire pas mal de choses à une époque. Nous échangions de longues lettres Elodie et moi, au sein desquelles j’ajoutais une ou deux nouvelles, avant d’attendre dans sa réponse une critique constructive et sérieuse de mes écrits. J’ai mis du temps à répondre car je ne sais pas si j’écris toujours. Je note des choses, je commence des phrases, je vais parfois même jusqu’à remplir plusieurs pages, mais de là à dire que j’écris, que cela ressemble à de l’écriture, ça ne serait pas vrai… J’ai finalement dit que j’y croyais toujours un peu et que depuis quelques semaines, j’avais réussi à m’y remettre, doucement.

Lundi

J’ai eu l’impression de passer une très mauvaise journée. D’être transparent auprès de mes collègues, de n’avoir rien de spécial à raconter, d’avoir du travail mais de n’avoir pas envie de le commencer. J’avais l’impression que la journée ne finirait jamais.

Je me suis senti mieux quand j’ai retrouvé Sandrine et que nous avons acheté une baguette de pain bien chaude. Encore mieux quand j’ai retrouvé mon fils.

Au badminton, j’ai un peu souffert et pris moins de plaisir que d’habitude. En effet, j’ai suivi les conseils qu’on m’avait donné ces derniers temps : jouer avec et contre des gens plus forts. Je me suis retrouvé en double avec un mec (Stéphane) très fort, très vif et vicieux, et qui aime gagner. Du coup, il me mettait vachement la pression car je ne me plaçais pas bien, car je ne faisais pas les bons gestes. Même quand je finissais par marquer un point, voire un beau point, c’était pas mal mais j’avais eu de la chance parce qu’en jouant comme ça à un autre niveau, j’allais me faire allumer.

Nous avons quand même gagné des matchs, notamment contre mon capitaine d’équipe et un autre coéquipier bien plus forts que moi, et je ne me suis pas trop mal défendu mais j’ai surtout eu l’impression d’avoir été un boulet. De l’autre côté, sur un autre terrain, je voyais mes camarades de d’habitude qui avaient l’air de bien s’amuser et je les enviais.

Mais j’ai sûrement plus appris ce soir qu’en 5 mois, notamment sur le placement dans l’espace en double, selon que tu attaques ou que tu défendes. Ça va finir par rentrer.

A la fin, j’ai fait un simple contre Stéphane et je l’ai bien accroché. Il a tout de même fini par me faire quelques compliments me disant que grâce à mon physique, je pouvais pallier certains de mes défauts car j’étais sur tous les volants.

C’était beaucoup moins paisible que d’habitude mais si tout était facile dans la vie…

Mardi

En montant les escaliers pour rejoindre le RER, j’ai senti que quelque chose n’allait pas. En effet, beaucoup de gens redescendaient, agacés. Au milieu, j’ai vu une jeune fille étendue, des agents RATP autour d’elle. Je l’ai reconnue, il s’agissait de la voisine des parents de Sandrine. Elle n’avait pas l’air bien. J’ai essayé d’imaginer ce qu’elle avait eu, une chute en ratant une marche, un malaise. Une journée de merde pour elle en tout cas.

De mon côté, je n’ai pas cherché à comprendre. J’ai pris le bus dans l’autre sens, prévenu Sandrine qui m’a rejoint à l’arrêt devant chez la nourrice et nous avons pris le RER E.

La neige, le froid, la grisaille matinale, n’ont pas aidé à me dire que cette journée serait meilleure que celle d’hier mais finalement, rien de spécial à signaler. Vivement que l’hiver se termine !